BSB Toyota, concessionnaire officiel de la marque Toyota en Tunisie, est un acteur important sur le marché de l’automobile.

Bien que la marque nipponne ait fait son entrée sur le marché local des voitures particulières sur le tard par rapport à certains autres concurrents (pour les raisons que tout le monde sait), elle a su néanmoins gagner rapidement la confiance des Tunisiens et positionner favorablement sa gamme de produits. Son premier responsable, Moez Belkhiria, considère que cette performance est le fruit de la fiabilité des produits Toyota et d’un savoir-faire cumulé de près de 30 ans de BSB Toyota.

Aujourd’hui, si les ventes de la marque ralentissent, c’est notamment à cause de la conjoncture difficile qui pousse le client à raisonner souvent en termes de prix uniquement, d’autant plus que le marché est en train de vivre une mutation profonde après l’entrée en scène de plusieurs nouveaux acteurs. Le premier responsable de BSB Toyota estime que le marché va se stabiliser en deux ou trois années maximum. En attendant, le concessionnaire ne veut pas rester les bras croisés. Il vient de passer à l’offensive en utilisant l’argument qu’il maîtrise le mieux, à savoir l’hybride dont Toyota est le pionnier mondial.

Il y a quelques années, BSB Toyota a introduit des voitures hybrides en Tunisie, parlez-nous de cette expérience ?
La marque Toyota a débuté la commercialisation des véhicules hybrides en 1997. A l’époque, BSB Toyota était privée de commercialiser les voitures particulières en Tunisie pour des raisons connues par tout le monde. Ce blocage a duré jusqu’à 2011. La première tentative de notre part pour introduire en Tunisie les véhicules hybrides était une simple manœuvre pour obtenir l’agrément de commercialisation des voitures particulières.

En fait, deux modèles Prius hybrides seulement ont été importés en 2002 dans l’objectif de les présenter aux ministères de l’Environnement, du Commerce, du Transport et à la présidence de la République. D’ailleurs, ils avaient été fournis à titre gratuit afin de tester cette nouvelle technologie qui a fait ses preuves dans le monde entier et découvrir ses avantages. La tentative avait malheureusement échoué. En 2009, voulant retenter le coup, une nouvelle voiture hybride avait été importée, mais cela n’avait pas marché non plus.

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Ne pensez-vous pas que le prix du véhicule hybride a constitué un frein aux projets ?
La question du prix n’a jamais été abordée car l’objectif était d’obtenir l’agrément pour la commercialisation des voitures particulières. Mais à vrai dire, il y avait à l’époque des demandes de Tunisiens résidents à l’étranger désireux d’avoir des véhicules hybrides. Nous aurions pu également viser les propriétaires de taxis et les ambassades. Nous aurions pu le faire en hors taxes aussi. Mais assurer le service après-vente pour 4 ou 5 unités vendues par an n’est pas faisable du point de vue rentabilité.

Pensez-vous que le marché est disposé aujourd’hui à assimiler la technologie hybride ?
Absolument, l’avantage actuellement par rapport aux années précédentes, c’est la loi de finances de 2018 qui encourage l’utilisation des voitures hybrides et électriques. Cette loi a fait bénéficier aux importateurs de ce type de véhicules une déduction de 30% sur les taxes et droits de douane.

Par exemple, une voiture à moteur thermique de 2 litres paye 120% de droits et taxes tandis que la même voiture avec un moteur hybride ou électrique paye moins cher de 30%. Certes, c’est un pas avant mais pas encore suffisant pour deux raisons essentielles. D’abord, les technologies hybrides et électriques sont plus coûteuses, ce qui fait que les prix des véhicules intégrant ces technologies sont plus élevés par rapport aux véhicules conventionnels ou à moteurs thermiques. Ensuite, les moteurs thermiques installés sur les voitures hybrides ont une cylindrée plus grosse par rapport aux mêmes voitures équipées d’un seul moteur thermique.

A titre d’exemple, la RAV 4 est équipée d’un moteur 2L essence dans sa version conventionnelle. Or, dans sa version hybride, elle a un moteur de 2.5L. L’objectif est de compenser le poids supplémentaire dû à un deuxième moteur électrique sur les voitures hybrides. Ce différentiel en termes de cylindrée fait passer la taxation à un palier supérieur. Par conséquent, l’abattement de 30% ramène le prix du véhicule hybride presque au même niveau que celui du véhicule thermique.

Cela n’encourage réellement pas le consommateur à aller plus vers les voitures hybrides. Malgré cela, nous nous sommes dits qu’il était temps de franchir le pas et familiariser le consommateur tunisien avec la technologie hybride en essayant de le persuader de ses atouts majeurs et que la majoration du prix de 10 ou 15% sera ultérieurement récupérée sur l’économie de consommation du carburant (entre 40 et 50%), en plus d’une durée de vie plus longue des pièces car il y a moins d’usure. Il s’agit donc d’un simple calcul à faire pour se rendre compte que même avec un prix plus cher, le consommateur est gagnant, sachant qu’à moins de 60km/h, la voiture hybride roule uniquement à l’électrique. Donc, c’est le choix idéal en milieu urbain.

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Les moteurs thermiques installés sur les voitures hybrides ont une cylindrée plus grande par rapport aux mêmes voitures équipées d’un seul moteur thermique.

Quelles recommandations préconisez-vous pour faire évoluer la législation et mieux encourager la commercialisation des voitures hybrides en Tunisie ?
Au niveau de la Chambre syndicale des concessionnaires automobiles, nous avons abordé le sujet. Nous avons eu même des réunions avec l’ANME, l’ANPE et le ministère de l’Environnement pour justement leur dire que les avantages accordés au niveau de la taxation aux importateurs de voitures électriques et hybrides restent insuffisants.

Prenons l’exemple du Maroc qui a introduit les voitures hybrides depuis au moins 15 ans. Les importateurs ne paient que 2,5% de taxes et droits de douane sur les voitures hybrides, sachant que la taxation des véhicules chez eux est beaucoup moins élevée (avec seulement 30% de taxes et droits de douane sur l’importation des véhicules conventionnels).

En outre, les propriétaires de véhicules hybrides ne paient pas de vignette. Cela démontre la volonté de l’Etat marocain et les efforts déployés pour encourager les Marocains à acheter des voitures hybrides et électriques. En Tunisie, nous payons entre 20% (la taxe la moins chère) et 90% (la taxe la plus élevée). Ce que nous demandons, c’est de nous accorder une réduction substantielle. Pas comme le Maroc mais à la limite, ne pas dépasser 10% de taxes et droits de douane.

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Le pays souffre d’un déficit énergétique et de la balance commerciale. Donc, c’est dans l’intérêt de l’Etat d’encourager l’hybride. Il faut qu’il y ait une vision à moyen et à long-terme. Il ne faut pas raisonner uniquement en termes de recettes fiscales. En tout cas, le manque à gagner au niveau des recettes fiscales sera compensé par des gains réalisés au niveau de la subvention énergétique. Qui plus est, nous ne pourrons pas importer des milliers de voitures hybrides du jour au lendemain. Cela nécessite du temps. Donc, les pertes de l’Etat en la matière seront insignifiantes.

En définitive, l’Etat a tout à gagner en encourageant l’introduction des voitures hybrides et électriques.

Nous pourrons également le faire d’une manière progressive en commençant par un palier standardisé de taxes et droits de douane de 20% pour tous les véhicules pour atteindre progressivement le niveau du Maroc.

Quelle est votre cible prioritaire ?
A priori, le grand public, particulièrement le consommateur averti. Nous avons de jolis modèles séduisants à présenter à nos clients. Les organismes publics, les ministères et le département de l’environnement sont également concernés.

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Pensez-vous introduire dans une prochaine étape les véhicules électriques ?
Evidemment car Toyota dispose d’une large gamme de voitures hybrides (rechargeables et non rechargeables) mais aussi électriques. Elle commercialise aussi des véhicules qui roulent à l’hydrogène. Revenons à votre question, l’électrique est une tendance et une politique internationale. Tout le monde, tôt ou tard, s’y mettra. Et la Tunisie n’échappera pas à la règle. Donc, BSB Toyota va sûrement le faire d’autant que notre marque est un pionnier mondial dans ce domaine.

Nous commençons actuellement par l’hybride, mais dans une autre étape, nous allons mettre des voitures électriques sur le marché tunisien.

Néanmoins, parmi les contraintes aujourd’hui, c’est qu’ il n’y a pas de nomenclature douanière spécifique pour les véhicules électriques. La législation est donc en retard par rapport aux nouvelles technologies. J’ajoute qu’il n’existe pas un système bonus-malus pour récompenser ceux qui consomment moins d’énergie et pénaliser ceux qui en consomment le plus. Malheureusement, la loi pénalise toujours le consommateur dans le cadre de la taxe de la maîtrise de l’énergie. Cela prouve le côté archaïque et statique de la législation qui devrait être changée.

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« L’électrique est une tendance et une politique internationale. Tout le monde, tôt ou tard, s’y mettra. Et la Tunisie n’échappera pas à la règle ».

Un moteur supplémentaire signifie-t-il un coût supplémentaire pour changer la batterie et l’entretien ?La durée de vie d’un moteur électrique est égale à celle de la voiture. Pour la batterie, il y a une garantie du constructeur et son remplacement se fait au minimum après 10 ans. Si la voiture est bien entretenue, nous n’avons même pas besoin de la changer.